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Nouvelle écrite dans le cadre d'un concours dont le sujet était: "Il va y avoir du sport" à l'occasion des Jeux Olympiques de Paris

  Septembre 2024

                   Rêvons d’un monde meilleur

François est comme un lion en cage. Il enchaîne de petits allers-retours, les yeux rivés vers le même horizon. Il n’est d’ailleurs pas le seul à effectuer ce même rituel. Vêtus tout comme François, ils sont sept à sautiller, s´étirer et multiplier les petites courses, le visage fermé, synonyme de la plus grande concentration.     

Nous sommes à Marseille, dans un stade flambant neuf. François et ses acolytes s’apprêtent à disputer une course de vitesse.

Jusque-là, rien de vraiment surprenant.

Si j’ajoute qu’il s’agit de la finale du 400 mètres des Jeux olympiques, peut-être susciterai-je un peu plus votre intérêt.  

Alors pour couronner le tout, attardons-nous quelques instants sur la date du tableau d’affichage de ce stade…elle indique un 14 août 2124.

 

Il fait chaud. Quoi de plus normal pour un mois d’août sous le soleil provençal, mais pas excessivement, et c’est la première bonne nouvelle. Le si redouté réchauffement climatique, n’a finalement pas eu lieu. Vers les années 50 (2050), à force de subir tsunamis, tornades et sécheresses à répétition, les humains finirent par comprendre l’absolue nécessité de réduire les gaz à effets de serre et prirent de drastiques décisions.        

Depuis ce temps-là, il n’y a plus aucun véhicule individuel motorisé dans les grandes villes, mais uniquement des transports en commun à énergie renouvelable. Et surtout beaucoup de bicyclettes. Les rues de Marseille, tout comme celles des autres villes du monde, se sont transformées en gigantesques pistes cyclables.

Avec une moyenne de 40 kilomètres de vélo par jour, chaque Terrien fait en trois mois l’équivalent d’un Tour de France !

Suite à cette prise de conscience collective, il y eut cette bien curieuse mesure : tout habitant de la planète, est tenu de planter, puis d’entretenir à la campagne, une plante ou un arbre parmi une liste de végétaux à haute capacité d’absorption de CO2. Ainsi, le week-end, les Terriens prennent leurs bicyclettes pour aller cultiver leur verger. C’est aussi pour cela qu’ils font tant de kilomètres en pédalant.

Tout le monde s’est prêté au jeu…et ça a marché !

 

Le sport est au cœur de la société du xxiie siècle. Il est pratiqué de façon quotidienne, et pas simplement le vélo. Dans cette communauté devenue si altruiste, les sports collectifs se taillent la part du lion. Le football reste roi, mais son environnement a radicalement changé. Le hooliganisme n’est plus qu’un mot du dictionnaire du siècle dernier. Les supporters des équipes rivales se mélangent dorénavant dans les stades, inventent des chants pour se rendre respectivement hommage et font la fête ensemble, avant ou après les matchs.

Les enfants de tous âges, mêlés au troisième âge, garnissent chaleureusement les tribunes.

Sur le terrain, la donne a aussi changé. Je vous rassure, on joue toujours à onze contre onze et l’objectif reste de mettre un but dans la cage adverse, mais le comportement des joueurs est devenu exemplaire. Plus de vilain geste, de faute simulée ou d’inutile discussion avec l’arbitre. Ce dernier, qu’il soit homme ou femme (parité oblige), est désormais scrupuleusement respecté.         

L’Olympique de Marseille, en outre maintes fois vainqueur de la Ligue des champions en début de siècle, est à l’origine d’une bien belle initiative : instaurer l’humour dans les stades. Les virages Sud et Nord rivalisent d’imagination, entre chants, tifos et histoires drôles contées en mégaphonie pour faire rire l’ensemble du public.                  

Aujourd’hui, on va au Vélodrome comme on irait au spectacle d’un humoriste, et on en revient le sourire aux lèvres, quel que soit le résultat.

 

Mens sana in corpore sano, disaient déjà les Romains.

Ils avaient tellement raison !

La population mondiale n’a jamais été en aussi bonne santé. Fruit de l’exercice physique et d’une alimentation nettement plus saine, la morphologie de l’humain a également considérablement évoluée. En un siècle, la hauteur moyenne a augmenté de quelques quinze centimètres.

En 2114, plus aucun habitant du globe ne souffre de surpoids, diabète ou maladies respiratoires. Les hôpitaux sont désertés, médecins et infirmières en reconversions professionnelles, et les pharmacies ne vendent plus que des produits homéopathiques à base de plantes. Les jadis si puissantes entreprises du secteur sanitaire, se sont reconverties en œuvres sociales ou en ONG.

Le Big Solidarita a succédé au Big Pharma.

Dans cette nouvelle société, sportive, humaine et solidaire, il n’y a plus de place pour la violence, l’incivilité, ni même le racisme.

Quand on raconte aux jeunes que dans un autre temps, certains en discriminaient d’autres à cause de leur religion, origine ou couleur de peau, ils n’en croient par leurs oreilles.

Il n’y a plus de drogue non plus. Suite à une campagne publicitaire planétaire au slogan évocateur : « Le sport, c’est ma drogue », conjuguée à une prise de conscience également planétaire, les humains ne sont devenus accros qu’à l’exercice physique. Dans cette nouvelle configuration, les paradis artificiels n’avaient plus lieu d’être, ni les moyens de proliférer.

Par la même mouvance et conscientisation, le doping est également un mot qu’il faut désormais chercher dans les dictionnaires d’antan (tout comme le hooliganisme).

Il n’y a plus de guerre non plus. Puisque les habitants de notre terre, n’arrivaient décidément pas à comprendre le message commun des prophètes du premier millénaire : Aimez-vous les uns les autres, alors il a fallu leur expliquer d’une autre façon : Faites du sport, pas la guerre.

Et cette fois-ci, ils ont enfin compris…que Dieu soit loué !     

Les villes d’aujourd’hui, ont peu de chose à voir avec celles d’il y a cent ans. À mesure que les routes s’effaçaient, les espaces verts naissaient. En même temps que les voitures disparaissaient, les terrains de sport apparaissaient.

Les antennes de télécommunication furent retirées des toits des immeubles, pour que ces derniers soient recouverts de terrain de football, court de tennis ou encore pistes d’athlétisme.

L’utilisation des portables, est depuis le siècle dernier strictement limitée aux cas d’urgence. Si on veut parler à ses amis, pas d’autres choix que d’aller à leur rencontre…et en profiter pour faire du sport !

   

En 2114, on respire aussi bien sur l’avenue du Prado à Marseille, à présent parsemée d’herbe, que dans la montagne Sainte-Victoire en campagne aixoise. Quand on sait que le Prado, fut baptisé ainsi en hommage à l’avenue principale de Madrid, dont la traduction est « Prairie », après tout ce n’est qu’un juste retour aux choses. Il en est de même pour Paris et ses Champs-Elysées, sans doute nommés de la sorte de façon prémonitoire, anticipant l’inéluctable mise au vert.

Les dirigeants de ce nouveau monde, sont dorénavant des personnes essentiellement motivées par l’intérêt collectif et le bien-être de tous. Montrant l’exemple, ils sont pour la plupart des athlètes confirmés. L’actuel président de la République française est un ancien vainqueur de Roland-Garros, le premier ministre britannique, un médaillé olympique de cricket et le président des Etats-Unis un champion de skateboard.

 

Avec la disparation des conflits, maladies et rivalités, les grandes organisations mondiales telles que l’ONU, l’OTAN, l’OMS, n’avaient plus leur place. Elles ont été remplacées par des institutions dont le but est de rendre l’activité physique accessible à tous. Ce sont elles qui eurent l’initiative de supprimer les antennes des toits, pour les remplacer par des terrains de jeu. Comme autre exemple de leurs actions, citons l’aménagement de la journée de travail réduite à la matinée pour chaque Terrien, afin de consacrer son après-midi à la pratique du sport de son choix.       

 

Les Jeux olympiques étaient déjà le premier événement planétaire au xxe siècle.

Rien n’a changé deux cents ans après, si ce n’est qu’il n’y a plus besoin de trêve olympique, puisqu’il n’y a plus de conflit. Bien au contraire, certains pays autrefois en guerre, ont uni leurs forces pour y participer.

De ce fait, Israël et la Palestine défilent désormais main dans la main, et sous une bannière neutre. Il en est de même pour l’Arménie et l’Azerbaïdjan, l’Ukraine et la Russie, la Chine et Taiwan, et tant d’autres.

Le serment du fair-play, si cher au baron Pierre de Coubertin, est plus que jamais respecté. Les athlètes veulent toujours autant gagner, mais pas à n’importe quel prix, et consciencieusement dans le plus grand respect de leurs adversaires.

Le bonheur de participer, a largement pris le dessus sur la joie de gagner.

La solidarité, a pris le pas sur la rivalité.

Deux siècles après, Coubertin a enfin réussi son pari : Rendre le monde meilleur grâce au sport.

François est marseillais. Aujourd’hui et maintenant, bien calé dans les starting-blocks, il s’apprête à disputer la course de sa vie, qui plus est dans sa ville.

3, 2, 1, partez !

La détonation du pistolet vient de retentir.

François bondit, puis enchaîne de grandes et rapides foulées.

Après quelques secondes, et déjà les premiers quarante mètres franchis, il se retrouve au coude-à-coude avec deux autres athlètes.

Le public retient son souffle, le stade reste muet.

François donne tout ce qu’il peut, son corps répond favorablement, ses jambes aussi, mais il ne parvient pas à se détacher de ses poursuivants.

Alors il lui vient une idée.      

Au fur et à mesure que la ligne d’arrivée approche, il écarte peu à peu ses bras pour atteindre les mains de ses deux rivaux. Eux aussi redoublent d’effort, bien conscients du moment historique qu’ils sont en train de vivre. Cependant, malgré l’enjeu et la vitesse, le geste de François les interpelle. Alors ils finissent aussi par unir leurs doigts à ceux du Marseillais, pour terminer la course tous les trois les mains unies, dans une parfaite osmose.

Le public debout peut respirer à nouveau.

En accord avec les nouvelles règles des JO pour ce type de circonstance, les participants se partagent les médailles d’Or, même s’il y a eu une différence de chronomètre entre eux.

Ils seront donc trois à monter sur la plus haute marche du podium, sous les ovations d’une foule aussi chaleureuse, qu’heureuse.

François a réalisé son rêve en gagnant cette course, et de façon solidaire.

Alors pourquoi pas réaliser le nôtre, en rendant notre monde plus beau, juste et meilleur…grâce au sport !

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